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La « révolution verte » des imprimeurs

25 mai 2020

Imprim’Vert a 20 ans ! Initiative d’abord locale, puis de rayonnement européen, elle a rassemblé autour d’elle la grande majorité des acteurs – si disparates ! – de l’impression. L’objectif ? Donner des solutions aux problématiques environnementales du secteur.
Retour sur un label précurseur avec Matthieu Prévost, Responsable environnement et animateur national pour Imprim’Vert, également en charge de la RSE à l’UNIIC (1)

Du local à l’Europe en 20 ans

En vingt ans, Imprim’Vert s’est imposé comme le label environnemental référent des métiers de l’impression. Tout commence en 1998, sous l’impulsion de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat du Loir-et-Cher et de la Chambre Régionale de Métiers et de l’Artisanat de la région Centre. Depuis fin 2007, AMIGRAF est propriétaire de la marque et en assure la gestion nationale et internationale.

« À l’époque, il faut se rappeler que les produits chimiques utilisés dans l’imprimerie pouvaient être nocifs pour l’environnement, mais aussi pour les salariés » rappelle Matthieu Prévost. La priorité était donc d’innover pour limiter l’impact à tous les niveaux. Par exemple, une évolution sur l’étape du pré-presse (la réalisation des plaques d’impression à monter sur les presses), permise par la recherche et développement, a été à l’origine du CTP (création des plaques à partir d’un fichier informatique) avec révélateur à la gomme, puis au sans-développement.

Le numérique a joué une part importante dans la mutation de l’activité d’imprimeur. Même s’il ne reste pas adapté à tous les cas de figures, tels que les prospectus imprimés en très grandes séries par exemple, il a contribué à rendre cette industrie moins utilisatrice de substances controversées. Mais sans pour autant régler toutes les problématiques. « Attention aux transferts d’impacts » prévient le responsable d’Imprim’Vert, « le désencrage des papiers imprimés par procédé numérique, tels que électrophotographie [NDLR : utilisé pour la photocopie et l’impression laser], ou jet d’encre, est plus difficile et l’aval de la filière recyclage a tiré le signal d’alarme en exigeant un tri toujours plus fin ».

Un cahier des charges en cinq points

Pour être labellisé Imprim’Vert, un professionnel de l’impression doit agir sur 5 critères-clés :

  1. L’élimination conforme des déchets dangereux : faire collecter et éliminer de façon conforme à la réglementation ses déchets par des collecteurs agréés.
  2. La sécurisation des stockages de liquides dangereux : sécuriser le stockage des liquides neufs dangereux et des déchets liquides en cours d’utilisation ou non.
  3. La non-utilisation de produit toxique : s’engager à ne pas utiliser de produits étiquetés « toxiques », notamment certains produits CMR (effets cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction).
  4. La sensibilisation environnementale des salariés et de la clientèle : mettre en place une communication spécifique autour d’Imprim’Vert, afin de sensibiliser l’ensemble du personnel et les clients.
  5. Le suivi des consommations énergétiques du site : instauré en 2010, ce critère a pour objectif de sensibiliser les imprimeurs à leurs consommations en énergies, en instaurant un suivi trimestriel des consommations et le transmettre à chaque renouvellement de la marque.

 

imprim'vert

Pour obtenir le label, l’imprimeur sera audité par un des 200 référents environnement en Chambre de Métiers et de l’Artisanat et en Chambres de Commerce et d’Industrie. Il remettra aussi chaque année sa labellisation en jeu. « Le label a fédéré autour de lui plus de 80 % des imprimeurs nationaux » se félicite Matthieu Prévost, « dans un cadre réglementaire moins contraignant que celui de l’emballage au contact alimentaire par exemple, on peut dire que toute la filière impression a modifié ses pratiques ». Filière au demeurant très diverses par ses métiers, qui vont de l’imprimeur classique au sérigraphe sur verre, en passant par le reprographe, l’imprimeur sur tissus et, bien-sûr les imprimeurs offset en grandes séries.

« Nous avons été précurseurs en France ; les premiers à nous approprier ce type de démarche. Soyons en fiers ! »
Matthieu Prévost – Responsable Environnement & Animateur national, Imprim’Vert

Une communication plus responsable, pour quelques euros par an

Point important, ce n’est pas le coût du label qui peut être un frein. Dans un secteur qui compte plus de 90 % de TPE de moins de 10 salariés, les droits d’usages de la marque Imprim’Vert ne s’élèvent qu’à quelques dizaines d’euros par an. « En comparaison, et même si label et certification sont deux choses différentes, une démarche ISO 14001 demandera un investissement beaucoup plus conséquent » souligne Matthieu Prévost. Pour l’imprimeur qui veut s’engager, le retour sur investissement est un élément qui compte ! La recette du succès d’Imprim’Vert tient sans doute à sa capacité de permettre aux professionnels de l’imprimerie de baisser leurs externalités négatives sur la santé et l’environnement, à un coût très faible.

Le contexte actuel privilégie toujours plus le local, le national, le respect de l’environnement, les normes sociales avancées, etc. Les donneurs d’ordres sont, de fait, face à ces multiples exigences RSE (2), portées par le grand public, la société civile et les parties prenantes en général. Ils les reportent bien naturellement sur les fournisseurs que sont les imprimeurs. Ceux-ci n’ont d’autre choix que de les intégrer dans leur offre pour être éligibles aux appels d’offres. « Aujourd’hui, répondre à un marché public sans la caution “Imprim’Vert ou équivalent” comme il est mentionné dans le code des marchés publics, rendra difficile l’obtention des points sur le volet environnement » note Matthieu Prévost. Dans le secteur privé, en l’absence de code formel, c’est du côté de la responsabilité des achats qu’il faut chercher un levier. Le 11e Baromètre des achats responsables présenté par L’ObsAR en février 2020 et réalisé en partenariat avec OpinionWay, notait que 85 % des 143 organisations ayant répondu avaient mis en place une politique d’Achats Responsables, dont 11% depuis moins d’un an. Le tout sur des critères intégrant la conformité réglementaire, la lutte anticorruption, l’environnement, la vigilance fournisseurs et la responsabilité sociétale.

Coopération internationale

Imprim’Vert ne se limite pas qu’à la France. Le label est ouvert à tous les acteurs étrangers qui souhaiteraient opérer sur le marché national. Ils sont aujourd’hui très minoritaires. « Nous sommes les seuls en Europe et la première marque mondiale dans l’approche “site” que nous portons » précise Matthieu Prévost. Les autres démarches sont de type ISO ou locales telles que le Blue Angel Allemand ou le Nordic Swan pour les pays nordiques.

[bctt tweet= »Imprim’Vert défend le « printed in France » contre la tentation de la délocalisation de l’impression » username= »@mediapost »]

Imprim’Vert défend le « printed in France » contre la tentation de la délocalisation de l’impression. Une tentation qui, même si près de 80 % des prospectus sont imprimés en France (3), n’est pas toujours un bon calcul. D’une part, parce que les parties prenantes sont sensibles au « produire français » et, d’autre part, parce qu’un imprimeur local est plus à même de conseiller son client en matière d’écoconception, de qualité de fabrication et que les transports – avec les émissions de GES associées – seront logiquement réduits.

Une écoconception qui poursuit son chemin sous forme d’amélioration continue. À chaque problème identifié dans la chaîne de valeur, une réponse, permise par la recherche et le développement (R&D), est apportée. « Nous avons mis deux ans à apporter une solution aux encres UV, au départ difficilement désencrables, mais qui, maintenant, satisfont aux exigences des papetiers qui intègrent de la matière recyclée » indique Matthieu Prévost. À noter que les prospectus, généralement imprimés en très grandes séries, donc rarement par procédé numérique, échappent à cette problématique spécifique.
L’environnement, s’il est important, est une partie des exigences RSE portées par les donneurs d’ordres. Dorénavant, celles-ci portent également sur des points tels que la sécurité, la gouvernance, la corruption, comme l’indique le récent rapport de l’ObsAR. De quoi donner encore du travail de normalisation – et d’adaptation – aux imprimeurs.

« Le chemin est encore long et nous n’avons pas terminé notre tâche » conclut Matthieu Prévost.

Les chiffres

  • 80% imprimeurs labellisés
  • 90% des labellisés sont des TPE (-10 salariés)
  • 20 ans d’existence du label en 2019

A voir aussi : Les nombreux labels de l’imprimerie

 

Sources :
1 Union Nationale des Industries de l’Impression et de la Communication
2 Responsabilité Sociétale des Entreprises
3 77 % d’après l’étude SEREHO ADEME

La « révolution verte » des imprimeurs